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Lieu : Avignon, Vaucluse, France

jeudi 9 septembre 2010

8 septembre 2010 - séance de nuit


M. François Bayrou. Il est inacceptable, pour quelqu’un qui a le sens de la justice comme tous ceux qui sont sur ces bancs (« Non ! Non ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR) – en tout cas comme tous ici voudraient l’avoir –, de faire financer la réforme des retraites par des gens – des femmes pour l’essentiel – qui n’auront pas pu cotiser le nombre d’annuités exigées et qui auront donc les retraites les plus faibles.

Permettez-moi de vous dire que lorsqu’ils entendent parler de « retraite à taux plein » les Français pensent que les personnes concernées arriveront, bien que n’ayant pas suffisamment d’annuités, à avoir des retraites complètes. C’est un mensonge et une faute de présentation. En effet, il ne s’agit pas, pour ces gens, d’avoir des retraites complètes ; il s’agit d’avoir le droit de faire valoir les annuités qu’ils ont acquises, même si elles sont en petit nombre, et d’avoir une retraite proportionnelle à ce nombre. (Applaudissements sur divers bancs du groupe SRC.)

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Mme Marisol Touraine. … Or manifestement, puisque vous nous répétez à longueur de discours, monsieur le ministre, que votre réforme est juste, il faut, avant même que nous engagions le débat sur le contenu de la réforme, que vous envoyiez un signal extrêmement fort et clair à l’ensemble des Français pour leur montrer que, dans votre conception, la justice commence par l’affirmation qu’aucun Français, quelle que soit sa fortune et quels que soient ses revenus, ne sera exonéré d’une contribution pour rétablir les comptes de nos retraites.

Voilà les termes dans lesquels le débat est aujourd’hui posé. Or c’est sur ce sujet que vous ne voulez pas répondre. Nous aurons l’occasion, dans les prochains jours, d’aborder la question du financement que nous envisageons, les uns et les autres, pour le système de retraite, mais votre discours sur la justice de votre financement n’est tout simplement ni tenable, ni audible.

M. Jean-Paul

Mme Marisol Touraine. Je terminerai en disant qu’il est absolument indigne de prétendre que le projet socialiste est uniquement fondé sur des prélèvements complémentaires ou nouveaux et sur ce que vous appelez du matraquage fiscal ; car s’il y a matraquage fiscal, il est de votre côté. Le seul problème c’est que ce ne sont pas les mêmes qui vont payer.

M. Jean-Paul Bacquet. Ce sont les plus petits !

Mme Marisol Touraine. Votre gouvernement a transmis à Bruxelles l’annonce d’une augmentation des prélèvements obligatoires de deux points de la richesse nationale au cours des deux prochaines années, c'est-à-dire en 2010 et 2011.

. C’est un mensonge !

Mme Marisol Touraine. Comme je l’ai indiqué hier – et ces chiffres ont été abondamment relayés – pour un célibataire gagnant par exemple 100 000 euros par an, ce qui n’est déjà tout de même pas mal, la contribution que vous allez demander sera en effet de 202 euros. Et cette personne pourra éventuellement bénéficier d’un chèque de remboursement du bouclier fiscal.

M. Alain Néri. Eh voilà !

Mme Marisol Touraine. Et, évidemment, plus on monte dans l’échelle des revenus – pour ne pas prendre l’exemple emblématique de Mme Bettencourt ou d’autres personnalités (« Si ! Parlons-en ! » sur les bancs du groupe SRC) –, plus cela est vrai, et il est évident que ces chiffres font mal.

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Mme Marisol Touraine. Je terminerai en disant qu’il est absolument indigne de prétendre que le projet socialiste est uniquement fondé sur des prélèvements complémentaires ou nouveaux et sur ce que vous appelez du matraquage fiscal ; car s’il y a matraquage fiscal, il est de votre côté. Le seul problème c’est que ce ne sont pas les mêmes qui vont payer.

M. Jean-Paul Bacquet. Ce sont les plus petits !

Mme Marisol Touraine. Votre gouvernement a transmis à Bruxelles l’annonce d’une augmentation des prélèvements obligatoires de deux points de la richesse nationale au cours des deux prochaines années, c'est-à-dire en 2010 et 2011.

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mise au point


M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. La question de l’opportunité politique dépend de l’appréciation personnelle, mais je voudrais tout de même revenir sur les propos de notre rapporteur, M. Denis Jacquat. Je ne crois pas qu’on puisse exciper d’une circulaire du Premier ministre aux membres du Gouvernement pour imposer au Parlement de voter ou pas un texte.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Bien sûr !

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. La circulaire s’applique aux membres du Gouvernement, mais pas à l’institution parlementaire et à chacun des membres qui la composent. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Par conséquent, cet argument de forme n’est pas recevable et c’est naturellement en conscience que chacun a à se déterminer pour savoir si ce moment est le bon ou pas pour discuter du bouclier fiscal. Mais il s’agit là d’une appréciation personnelle et politique, évidemment pas juridique. Je regrette donc que notre collègue Denis Jacquat se soit placé sur ce plan qui, me semble-t-il, n’est pas le bon.

En ce qui concerne l’opportunité politique, on peut avoir une divergence avec ce que Pierre Méhaignerie vient d’indiquer, pour une raison assez simple : si chacun concède que le bouclier fiscal est devenu un symbole – qu’on le défende ou qu’on l’attaque –, chacun doit reconnaître aussi qu’au-delà du symbole c’est un verrou. Aussi loin qu’aille cette réforme dans les efforts à demander aux salariés – et je fais partie de ceux qui pensent qu’elle va très loin –, ces efforts ne suffisent pas à équilibrer les régimes de retraite, ni l’année prochaine ni dans dix ans.

Je me suis permis de le dire : les régimes de retraite ne sont équilibrés qu’en amalgamant le régime de base et les régimes complémentaires.

Au demeurant, les rapporteurs des commissions saisies au fond et pour avis l’ont dit dans leurs rapports, que j’engage chacun à lire attentivement : si les tableaux fournis par le pouvoir exécutif y sont loyalement décrits, il est également indiqué que les rapporteurs n’ont pu avoir accès aux documents budgétaires, régime par régime, démontrant l’équilibre de chacun de ces régimes année après année. La raison en est simple : ces régimes ne sont pas équilibrés. La CNAV – le principal régime de base – ne l’est pas. C’est Danielle Karniewicz elle-même qui le dit, chiffrant ce déficit à 3,2 milliards en 2018 et à 4 milliards en 2020. Dès l’année prochaine, ce déficit existe.

M. Pascal Terrasse. Bien sûr ! C’est évident.

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. Parce que le bouclier fiscal est un verrou et qu’il est quand même difficile de demander davantage encore aux salariés, on peut juger que le débat sur le bouclier fiscal est pertinent. En effet, si ce ne sont pas les salariés qui paient ce qui manque, il faut bien le récupérer autrement, c’est-à-dire par les prélèvements obligatoires, ce que, politiquement, vous ne pouvez pas faire, sauf à accepter que ceux qui bénéficient du bouclier fiscal ne contribuent pas à l’effort général.

Il est vrai que votre réforme prévoit deux milliards de prélèvements exonérés du bouclier fiscal sur un effort total de 30 – étant entendu, monsieur le secrétaire d’État, que je mets de côté les fameux 15 milliards. De même, 2 milliards de recettes sont demandés aux entreprises. Cela signifie que le solde – et ce n’est pas rien sur un effort total de 30 milliards – est à la charge des salariés.

Charles de Courson a exercé son talent, que l’on sait grand, pour condamner un projet alternatif, mais il a été assez sévère pour le projet que vous défendez, monsieur le ministre et mes chers collègues de la majorité. Si cette réforme prévoyait un équilibre réel des régimes de retraites, pourquoi Charles de Courson aurait-il proposé une augmentation du forfait social ou une augmentation de la CSG pour les retraités ?

Il fait partie, que je sache, de la majorité présidentielle. Augmenter la CSG des retraités n’est pas une mesure politiquement anodine et, si l’un des vôtres, qui jusqu’à présent a toujours été loyal à la majorité présidentielle, indique à l’occasion de ce débat qu’il serait probablement nécessaire d’augmenter la CSG des retraités pour arriver à l’équilibre des régimes, c’est que, a contrario, votre projet ne prévoit pas cet équilibre.

Il a donc été sévère pour un projet alternatif, mais il ne me semble pas qu’il ait été conciliant pour le vôtre, sauf à juger qu’il est conciliant de demander l’augmentation des prélèvements obligatoires que constituerait une hausse du forfait social et de la CSG.

À propos du forfait social, d’ailleurs, nous savons depuis cet après-midi que la Cour des comptes préconise un relèvement du forfait social de 4 % à 19 %, précisément pour restaurer les finances sociales, la Cour estimant qu’il manque 15 milliards, non pas pour arriver à l’équilibre mais pour tendre vers l’équilibre.

Le bouclier fiscal suscite un débat ; je fais partie de ceux qui pensent que ce débat serait opportun dans le cadre de ce texte-ci.

M. Pascal Terrasse. Bien sûr !

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. Sauf à nous démontrer, ce qui n’a pas été le cas, qu’on atteindra grâce ce projet de réforme l’équilibre des régimes de retraites, il faudra bien en effet trouver quelque part les financements manquants – Charles de Courson l’a implicitement admis.

Autrement dit, il faudra augmenter les prélèvements obligatoires. Ils sont – nous le savons tous – élevés en France si on les rapporte au PIB. Mais en Grande-Bretagne, les cotisations retraite ne sont pas comptabilisées dans les prélèvements obligatoires, ce qui biaise évidemment les comparaisons ; en Allemagne, le PIB est beaucoup plus élevé et progresse différemment cette année. Il ne faut pas l’oublier.

Alors vous pouvez, c’est vrai, refuser ce débat. Mais il faudra qu’il ait lieu. Chers collègues, cher Pierre Méhaignerie, qui évoquez une tranche supérieure de l’impôt sur le revenu, nous nous demanderons alors si vraiment un impôt sur le patrimoine doit être remplacé par un impôt sur le travail. Je pense, quant à moi, qu’un impôt sur le patrimoine ne peut être remplacé que par un impôt sur le patrimoine – sinon, on favorisera une nouvelle fois la rente au détriment du travail. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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