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samedi 10 janvier 2009

Gaza : «la trêve des bombardements, ça n’a aucun sens»
En téléconférence avec plusieurs dizaines de journalistes depuis le centre-ville de Gaza, Jessica Pourraz, responsable MSFdans le territoire palestinien évoque les conditions de vie de la population et les conséquences de l'annonce d'une trêve des bombardements israéliens trois heures par jour.
08 janvier 2009
Sud de la bande de Gaza, le 30 décembre 2008.
REUTERS/Ibraheem Abu Mustafa
"Il y a une catastrophe humaine qui se joue sous nos yeux. Personne ne peut fuir car le territoire est verrouillé depuis 18 mois. Il y a des quartiers sans eau potable. Il n'y a plus d'électricité, la nourriture est insuffisante. Il y a des queues immenses devant les boulangeries.
Tout le monde est victime des bombardements. On ne dort plus, plus personne ne travaille, on manque de tout et l'insécurité est partout. La population n'en peut plus. Les gens veulent juste que ça s'arrête. Nous, on travaille avec les générateurs d'urgence 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. On essaye de faire de notre mieux mais on a peur aussi, la nuit pendant les bombardements
."
Gaza : « Il ne faut pas se leurrer »
Jessica Pourraz, responsable des opérations MSF à Gaza, constate que, sur le terrain, la situation n'a pas changé : les conditions de sécurité ne permettent toujours pas aux équipes médicales et à l'aide humanitaire d'apporter des secours à une population qui ne peut fuir nulle part.
La situation à Gaza ville est très dangereuse. C'est extrêmement dangereux de se déplacer parce qu'il y a sans arrêt des bombardements aériens. Les ambulances n'arrivent pas à obtenir les autorisations pour pouvoir passer derrière les chars et chercher les blessés. Les blessés qui arrivent à atteindre les hôpitaux sont pour la plupart des blessés très sévères, les autres restent chez eux et attendent que les combats cessent pour aller se faire soigner.
La trêve ne change rien.
La trêve n'apporte rien de différent. Elle n'a eu lieu que sur la ville de Gaza, pas dans les périphéries urbaines. Les chars ont commencé à rentrer dans les zones urbaines périphériques de Gaza ville qui sont des quartiers comme Beit Lahya, Beit Hanoun, Sijaya, Zeïtoun. Il y a de plus en plus de civils blessés, c'est là qu'il faut aller chercher les blessés. Il ne faut pas se leurrer, la trêve n'aide en aucun cas le travail des humanitaires et l'accès des gens aux hôpitaux.
On est à Gaza, on est en plein milieu de tout ça mais on ne peut pas avoir accès aux patients et on ne peut pas travailler correctement. Il y a un vrai problème. Nous avons besoin d'atteindre les blessés et que les blessés puissent atteindre les hôpitaux et nous avons besoin de pouvoir faire entrer du matériel, ce qui est encore très limité parce que les camions ne peuvent pas circuler.
Pallier des manques médicaux précis.
Nous donnons du matériel médical aux hôpitaux et notre personnel médical soigne les blessés et les malades qui se trouvent dans leur quartier, car il est trop dangereux de se déplacer. Les structures hospitalières fonctionnent et il y a le personnel compétent. L'hôpital Al Shifa, entre le 27 décembre et le 5 janvier, avait réalisé plus de 300 opérations majeures, en grande partie des amputations, des traumatismes crâniens ou multiples, des explorations abdominales, qui sont toutes des opérations lourdes.
Il y a un manque de chirurgiens spécialisés et une équipe MSF doit arriver, si elle peut entrer avec notamment un chirurgien vasculaire parce que quand il y a des blessés, et des blessures qui saignent beaucoup, cette spécialité est essentielle. Il y a un manque de place en soins intensifs mais là encore nous essayons de faire venir des tentes gonflables spécifiques pour installer une unité de soins intensifs et un ou deux blocs opératoires. Si nous avons accès, il y a les moyens d'assurer les soins médicaux nécessaires ici.
Une catastrophe humaine.
Une catastrophe humaine se joue sous nos yeux. Normalement quand il y a la guerre dans un pays, les gens fuient. A Gaza, personne ne fuit. Gaza est quand même la zone avec la plus forte densité de population au monde et ils ne peuvent aller nulle part. Les gens vivent dans un état de terreur permanent et n'ont envie que d'une chose : que ça s'arrête.
Ils ne dorment pas, à chaque fois que vous allez vous coucher, vous ne savez pas si le lendemain la maison sera toujours debout ou pas. Beaucoup de famille ont quitté leur domicile, soit parce que les tanks approchaient soit parce que leur maison a été complètement détruite. Ils essayent de se réfugier tant bien que mal dans les écoles, mais aucun lieu n'est sécurisé actuellement à Gaza. Il y a des bombardements incessants, il n'y a plus d'électricité, les hôpitaux dépendent de générateurs.
Manque de nourriture et de matériel de base.
La nourriture manque également. Il y a des files énormes devant les boulangeries. Avant la guerre, un million de personnes, sur une population totale de 1,5 million de personnes, vivaient de l'aide alimentaire. Aujourd'hui, les besoins ont probablement augmenté mais l'accès est réduit : les camions ne peuvent pas se déplacer en sécurité, les gens ne peuvent pas se déplacer dans les centres de distribution. Il y a des besoins encore en eau potable et en matériel de base pour les déplacés, comme des matelas ou des couvertures, toutes ces choses qui permettent aux gens de survivre. Le pire est que des humanitaires sont là et ne peuvent rien faire.

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