M. Jean Mallot Madame la présidente, monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, mes chers collègues, jeudi dernier a été discutée ici notre proposition de résolution estimant urgente la mise en œuvre de l’article 11 de la Constitution sur l’extension du référendum.
Brillamment présentée par notre collègue Michel Vauzelle, cette résolution n’a pas eu le bonheur d’intéresser l’UMP. Ce jour-là, elle avait décidé de boycotter les débats sur nos propositions et organisé l’absentéisme sans risque de ses députés. L’UMP nous avait pourtant tellement bassinés avec ce droit nouveau reconnu aux parlementaires de présenter des résolutions qu’on aurait pu s’attendre à ce qu’elle participe au débat ! Il n’en a rien été. Il est étrange de voir que l’explication de vote de l’UMP aujourd’hui, mardi, sera faite par un député qui n’était pas présent lors de la discussion jeudi dernier…
Il s’agit pourtant de demander la mise en application du référendum d’initiative partagée, voté à la quasi-unanimité de notre assemblée, grâce à un amendement d’Arnaud Montebourg lors de la révision constitutionnelle de l’an dernier.
M. Maurice Leroy. Que vous n’avez pas votée !
M. Jean Mallot. Désormais, un référendum pourrait être organisé à l’initiative d’un cinquième des membres du Parlement, soutenus par un dixième des électeurs de ce pays. Il ne manque plus, pour cela, qu’une loi organique définissant les modalités.
Pourtant, le Gouvernement traîne et tarde à présenter son projet de loi organique. Ce référendum d’initiative parlementaire et de soutien populaire pourrait porter sur l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes économiques, sociales ou environnementales et sur les services publics. Voilà un droit nouveau !
Mais, dans la France d’aujourd’hui, l’empereur, sa femme et, maintenant, le petit prince (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP) veulent tout contrôler, tout décider. Ils n’aiment pas les contre-pouvoirs, réels ou potentiels ; ils veulent maîtriser les médias, le pouvoir économique, la justice, le Parlement et les collectivités locales en les étranglant. Laisser la parole au peuple ? Vous n’y pensez pas !
Alors, le Gouvernement joue la montre ; il fait ce que l’on appelle de l’obstruction. L’argumentaire du ministre, jeudi dernier, était assez révélateur : il a enfoncé toutes les portes ouvertes. « La loi organique devra résoudre beaucoup de problèmes techniques », a-t-il dit. Ou encore : « Le soutien des électeurs doit être recueilli dans des conditions qui ne laissent place à aucune forme de contestation ou de doute.» Certes ! « Il faut vérifier l’inscription sur les listes électorales et authentifier la signature des électeurs. » « Il faut prévoir les modalités de procuration. » « Plusieurs commissions seront sans doute nécessaires pour cela. » Comme si l’on ne savait pas, en France, organiser des référendums ou des élections !
En réalité, le Gouvernement et l’UMP ont vu, à l’occasion de la votation citoyenne du 3 octobre dernier contre la privatisation de La Poste, que les Français savaient se mobiliser pour défendre le service public. Plus de deux millions de signatures en quelques jours, avec une simple organisation bénévole et malgré les menaces contre les maires, ont exprimé notre attachement au service public de La Poste. Les Français aiment ce service quotidien, auquel chacun a accès, quelle que soit sa condition sociale. Leur mobilisation a été forte et le mépris affiché par l’UMP à l’égard de leur démarche est bien mal placé. Quant à nous, nous venons de déposer une proposition de loi permettant le lancement d’une campagne référendaire sur le statut de La Poste et nous militons pour une charte des services publics annexée à la Constitution.
Jeudi dernier, le ministre, dans sa réponse, après de longues et laborieuses explications, a fini par s’engager à ce qu’un projet de loi organique relatif au référendum d’initiative parlementaire et populaire soit déposé à l’Assemblée nationale avant la fin de cette année. Mais quand sera-t-il à l’ordre du jour ? Quand sera-t-il discuté, adopté, et donc applicable ? Sur ce point, on ne nous dit rien.
L’une des explications se trouve dans le troisième alinéa de l’article 11 de la Constitution. Le référendum d’initiative parlementaire et populaire « ne peut avoir pour objet l’abrogation d’une disposition législative promulguée depuis moins d’un an. » À l’évidence, le Gouvernement et l’UMP veulent faire voter le nouveau statut de La Poste, et donc la marche vers la privatisation, avant de permettre l’organisation d’un référendum, lequel ne pourrait avoir lieu avant 2001, voire plus tard. La manœuvre est claire.
De cet état de fait, nous pouvons tirer trois conclusions.
Premièrement, la revalorisation du Parlement est un beau discours, sans contenu réel, et les droits de l’opposition un leurre.
M. Bernard Roman. C’est vrai !
M. Jean Mallot. Deuxièmement, le Président de la République, le Gouvernement et l’UMP ont un double langage : ils promettent un droit nouveau aux parlementaires et au peuple, viale référendum, mais ils font tout pour que celui-ci ne s’applique pas.
Troisièmement, madame la présidente – j’en viens à ma conclusion –, il y a effectivement urgence à rendre applicable l’article 11 de la Constitution pour permettre aux citoyens de ce pays de s’exprimer sur des sujets qui les intéressent. Nous invitons donc toutes celles et tous ceux qui, sur ces bancs, ont une parole et respectent les engagements qu’ils ont pris, à voter notre proposition de résolution. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
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