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Lieu : Avignon, Vaucluse, France

mercredi 19 septembre 2007

Assemblée nationale
Le 18 septembre 2007 - brides
Madame Pau-Langevin,
….Curieuse dénomination que celle de ce ministère qui manifestement entend s'approprier, voire manipuler, les peurs, les inquiétudes, le malaise d'une partie de l'opinion face à un monde qui change très rapidement, face à la précarité et à la concurrence toujours plus rude entre individus et pays dans une course toujours plus exigeante à la rentabilité économique. Cette dénomination a en elle-même suscité un malaise, tant il est vrai que jamais, sauf peut-être à une période limitée et peu glorieuse de notre histoire, on n'avait confié l'identité nationale aux bons soins d'une structure administrative. Ce vaste sujet aurait pu être traité par le Collège de France ou l'Académie, en référence à la Constitution, à la littérature, à l'histoire, mais pourquoi par un ministère chargé par ailleurs de l'immigration…
Serge Blisko
…Ce texte marque donc une suspicion envers les familles d’étrangers en situation régulière, mais aussi envers les Français désirant faire venir leur conjoint. Vous entretenez la confusion entre l’asile et l’immigration. La meilleure preuve de cette suspicion est le dépôt en commission de cet amendement sur le test ADN pour le regroupement familial, sous le prétexte que, selon un rapport sénatorial, l’état civil n’aurait « pas grande valeur » dans certains pays. Les pays amis d’Afrique apprécieront, puisqu’ils sont nommément désignés. Vous insistez, Monsieur le rapporteur, sur le caractère « volontaire » du test génétique pour les enfants désirant rejoindre leurs parents en France, l'objectif étant d'aller plus vite dans la procédure de regroupement familial : comme vous l’avez déclaré dans une interview, jeudi dernier, « soit on préfère attendre un an et demi, soit on se porte volontaire, et on aura la preuve en 15 jours. Et tant pis pour ceux qui ne pourront pas faire de tests ADN à leur frais : ils attendront des mois, voire des années, que l'on vérifie leurs papiers. Ces propos sont scandaleux ! Cette disposition établit en effet une discrimination : qui pourra se payer ces tests, qui coûtent entre 200 et 600 euros ?.....
….Il y a plus grave : l'article 16 du code civil dispose que « l'étude génétique des caractéristiques d'une personne ne peut être entreprise qu'à des fins médicales ou de recherche scientifique ». Votre amendement conduit également à modifier le code pénal dans son article 226-28. Le sénateur Claude Huriet, président de l'Institut Curie, note par ailleurs qu'une telle disposition serait contraire à la loi bioéthique, qui encadre très strictement le recours à de tels tests. Nous avons travaillé pendant des années pour que les lois bioéthiques soient consensuelles. Il nous semblait qu’au-delà des clivages partisans, nous avions la même volonté de nous opposer aux dérives des pays anglo-saxons, où l’on fabrique aujourd’hui des chimères. Est-ce cela que vous voulez ? Je vous le dis au nom des droits de l’enfant et de tous nos principes, pas seulement républicains : vous faites fausse route en nous entraînant vers un utilitarisme absolument contraire à la tradition française ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) La convention d’Oviedo du Conseil de l’Europe interdit du reste ce genre de pratique.
En France, ce n'est pas le sang qui détermine la filiation. Il serait inconcevable de demander à un père de venir avec un test génétique pour déclarer son enfant. Il paraît d’ailleurs que mieux vaudrait ne pas le proposer (Sourires)… Le père, c’est celui qui élève son enfant : c’est en tout cas la tradition constante de notre droit…
Que vont devenir, d’autre part, ces données génétiques ? Seront-elles archivées dans le Fichier national des empreintes génétiques, réservé aux délinquants et aux criminels ? Nous serions là dans le 1984 d’Orwell, et je ne donnerais pas cher des libertés individuelles. Vous assimileriez en outre l’immigré au délinquant, ce qui serait très grave…..
Noël Mamère
….Quant à notre rapporteur, je n’hésite pas à dire qu’il a introduit dans le projet de loi du Gouvernement un amendement crapuleux et nauséabond… (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche ; protestations sur les bancs du groupe UMP) Oui, crapuleux, nauséabond, et motivé par la seule perspective des élections municipales, car il faut bien attirer vers vous un certain électorat. (Protestations sur les bancs du groupe UMP)
Comme l’ont justement relevé Mme Pau-Langevin et M. Blisko, vous n’avez pas hésité une seconde à remettre en cause un principe inscrit depuis près de deux cents ans dans le code civil et confirmé à l’unanimité de notre Assemblée en 1994 et 2004 lors de l’examen des lois sur la bioéthique. Nous avions alors affirmé que les tests ADN devaient être strictement réservés aux investigations médicales. De fait, nulle famille française ne peut être soumise à de tels tests. Or voilà que vous prétendez l’imposer aux familles immigrées qui veulent se regrouper. Il s’agit, ni plus ni moins, d’une nouvelle forme d’apartheid et de ségrégation entre ceux qui peuvent vivre chez nous normalement et ceux sur qui pèse un soupçon permanent. C’est un véritable renversement républicain qui va contre la morale. En y cédant, vous prenez une lourde responsabilité…..
François Loncle
…En votre qualité de ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et de que sais-je encore (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), vous êtes, Monsieur le ministre, « à l’intérieur », comme on disait autrefois. Autrement dit, vos objectifs sont de politique intérieure, à visée strictement électorale, pour une clientèle que vous ne cessez de flatter (Mêmes mouvements). Mais l’image de notre pays est, elle, compromise, ternie et menacée. Aux yeux de très nombreux peuples, la France des droits de l’homme, la République française à la noble devise est devenue progressivement un pays où l’on suspecte celui que Prévert qualifiait – mais avec tendresse, pour ce qui le concernait – d’« étrange étranger », où l’on rejette l’immigré parce qu’il est étranger. C’est navrant, mais c’est bien ce dont on se rend compte lorsqu’on est en visite dans les pays du Sud de la Méditerranée, et je ne doute pas que vous vous y soyez rendu aussi, Monsieur le ministre, vous qui nous demandez de nous barricader contre les plus faibles, les réfugiés victimes des guerres et du sous-développement….
…Le droit d’asile, droit fondamental jusqu’à présent scrupuleusement respecté par notre pays, ressortit désormais de la politique d’immigration et le demandeur d’asile fait l’objet d’une suspicion a priori. Il s’agit, nous explique le rapporteur, d’« éviter des détournements de procédure »… Afin, sans doute, que ce nouvel esprit des lois soit plus sûrement respecté, le ministère des affaires étrangères se voit enlever la responsabilité de l’OFPRA, qui était sienne depuis la création de l’Office, en 1952. Le Quai d’Orsay a-t-il démérité ? Ou s’agit-il encore d’un détournement de principe, la défense du droit étant subordonnée à la nécessité de refouler le maximum d’étrangers au prix éventuel de contorsions juridiques ? Le ministère des affaires étrangères ainsi diminué a subi dès la constitution du premier gouvernement de M. Sarkozy une autre amputation révélatrice de la régression politique en cours. La politique de coopération, à présent dite « de codéveloppement », relevant désormais du ministère de l’identité nationale, est conçue comme l’un des instruments permettant de contenir ceux que la droite désigne comme des boucs émissaires. En évoquant à Dakar un « homme africain » qui serait, comme par essence, différent des autres, le Président de la République a repris à son compte une conception poussiéreuse, paternaliste et raciale des relations entre les peuples. On ne sache pas qu’il ait trouvé bon d’évoquer l’« homme américain » lors de ses vacances aux États-Unis… Il est regrettable que cette rupture idéologique et l’abandon des traditions républicaines d’ouverture, de dialogue et de respect aient été le fait de celui qui en est pour cinq ans le gardien suprême.
Le rejet de l’autre que reflète la nouvelle politique extérieure de la France a sans doute offert quelques avantages électoraux, jugés très attrayants, mais ce choix est, à terme, intenable sur le plan international….
Etienne Pinte (UMP)
…Lorsqu'il est question d'immigration, j'ai l'impression d'assister à une bataille de chiffres quotidienne. Les objectifs ne sont que quantitatifs, et il serait même question de légiférer bientôt sur des quotas, terme que je n’aime pas, même si je ne suis pas assez naïf pour croire que notre pays peut accueillir toute la misère du monde. N'oublions jamais que derrière des nombres jetés en pagaille il y a des hommes, des femmes et des enfants, très nombreux et en grande souffrance, et pour lesquels « émigrer » rime avec « nécessité ».
Le texte qui nous est présenté aujourd'hui ne s'attaque pas à l'essentiel car il se focalise sur le regroupement familial, qui n'est pas la première source d'immigration, au lieu de traiter les vrais problèmes, concentrant nos moyens pour limiter l’afflux d'étrangers dans toute l’Europe et augmenter substantiellement l'aide au développement.
Il est question des conditions d'accueil de l’émigrant, mais je m'interroge : les dispositions prévues visent-elles réellement à intégrer l'étranger, ou plutôt à sélectionner les candidats à l'immigration ? L'objectif affiché ne dissimule-t-il pas le sempiternel enjeu des chiffres….
Françoise Hospitalier (UMP)
…Vous avez demandé aux préfets de respecter un quota de reconduites à la frontière. La loi doit être appliquée, j'en conviens. Mais derrière les chiffres, Monsieur le Ministre, il y a des êtres humains, et autant qu’aux clandestins, je pense aux forces de l’ordre. Récemment, après une interpellation de clandestins pendant laquelle tout s’était «bien» passé, sans révolte, avec seulement des larmes, – mais l’un de ces hommes avait femme et enfants – les gendarmes m'ont dit leur désarroi, ils m'ont dit avoir espéré que le juge saurait trouver la solution humaine. Et c'est bien là toute la difficulté de lois comme celle que vous nous proposez : Protéger notre pays des risques de flux migratoires incontrôlés, mais traiter les personnes avec humanité et dignité…
Plusieurs articles renvoient à des décrets d'application. S’agissant d’un texte aussi sensible, et dans le cadre plus général de la modernisation de nos institutions, je souhaiterais que le Parlement, ainsi que des organismes spécialisés, soient associés à leur rédaction. En effet, trop souvent – l'affaire du droit au logement opposable nous en fournit un triste exemple –, les décrets complexifient la loi, voire en dénaturent l'esprit…
Patrick Braouezec
…Intéressons-nous d’abord à la reconnaissance du droit des migrants. Dans la lettre de mission qui vous a été adressée le 9 juillet, un objectif a retenu mon attention : l'engagement de concertations pour l'élaboration d'un traité multilatéral définissant les droits et devoirs des Etats en matière de gestion des flux migratoires. Or il existe déjà une Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, adopté par l’ONU le 18 décembre 1990 et entrée en vigueur le 1er juillet 2003, que 37 États – dont l'Algérie, le Sénégal, le Maroc ou la Turquie – ont ratifiée à ce jour. Aucun État membre de l’UE n'a cependant mis son paraphe au bas de ce traité.
Cette Convention, dont l'objectif premier est de protéger les travailleurs migrants de l'exploitation et de la violation de leurs droits humains, institue un cadre propre à garantir des conditions équitables en ce qui concerne les migrations internationales. Le seul argument avancé par la France à l’appui de cette absence de ratification par l'intermédiaire de son ministre des affaires étrangères, en août 2005, dans une réponse à la Commission nationale consultative des droits de l'homme, porte sur des dispositions fiscales contraires à notre droit.
Aujourd'hui, les pays de l'OCDE fournissent l'équivalent de 100 milliards de dollars – 73 milliards d'euros – d'aide annuelle. Ce chiffre est à rapprocher des 360 milliards de dollars d'intérêts de la dette que les pays en développement remboursent chaque année. En outre, la France devrait consacrer à cette aide 0,7 % de son PIB, ce qu’elle ne fait pas. Si le Gouvernement veut vraiment parler du codéveloppement, qu’il commence par cesser de soutenir les politiques d’ajustement structurel imposées par les institutions financières internationales et par contrôler l’activité des sociétés transnationales !
La France devrait aussi faire preuve de plus de transparence, en renonçant aux artifices comptables qui consistent à élargir l’assiette de l’aide au développement en incluant certaines dépenses relatives aux DOM-TOM, au développement de la francophonie ou à l’accueil des demandeurs d’asile….
Etc….

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