La jeunesse est exclue du pouvoir dans les pays arabes
La gérontocratie plutôt que la démocratie
http://www.elwatan.com/evenement/la-gerontocratie-plutot-que-la-democratie-02-02-2011-109872_115.php
D’est en ouest, les pays arabes étouffent encore sous des régimes totalitaires faits de pétromonarchies rétrogrades.
En 1962, Abdelaziz Bouteflika est, à 25 ans, le plus jeune ministre du gouvernement Ben Bella et, sans doute, du monde. Une fierté pour un pays jeune qui vient d’accéder à l’indépendance en payant le prix fort. En 2011, à l’âge canonique de 73 ans, le même Bouteflika est plus que jamais au sommet du pouvoir. Même si les signes de vieillesse, de l’âge et de la maladie se lisent sur son visage comme dans un livre ouvert, cela ne l’empêche nullement d’entamer sa douzième année de règne sans partage, après avoir fait sauter le verrou constitutionnel qui limitait les mandats présidentiels à deux. Une exception ? Plutôt une règle générale dans un monde arabe gouverné d’une main de fer par de vieux croulants qui s’accrochent désespérément à leur fauteuil et à leurs privilèges.
Dirigeants arabes levez-vous ! Bouteflika, 73 ans, dont 12 ans de règne. Kadhafi, 69 ans, dont 42 ans de règne. Hosni Moubarak, 82 ans, dont 30 ans de règne. Ali Abdellah Salah, 70 ans, dont 21 ans de règne. Bachar El Assad, 46 ans, dont (déjà) 11 ans de règne. Il a succédé à son papa, Hafez, mort en 2000 après 30 ans de règne. Zine El Abidine Ben Ali, «Zinochet» pour les intimes, 74 ans. Sa carrière de dictateur s’est brutalement arrêtée après 24 ans de règne. Il a succédé à Bourguiba qui s’est maintenu au pouvoir pendant 30 ans.N’en jetez plus, la coupe est pleine ! C’est pour cette raison que les réunions de la très insignifiante Ligue arabe ressemble à un club du troisième âge ou un salon d’une maison de retraite.
L’automne des patriarches ?
Le plus acerbe dira qu’il s’agit du rayon fossile du musée de paléontologie. A moins que la Révolution du jasmin ne bourgeonne partout dans le monde arabe, la gérontocratie a encore de beaux jours devant elle. Même l’exemple de la première puissance du monde, qui s’est offert un président de 42 ans, n’a pas fait réfléchir. Barack Obama venait pourtant de succéder à un Bill Clinton envoyé à la retraite à l’âge de 55 ans après seulement deux petits mandats. Inimaginable au pays. Au cours des dernières décennies, le souffle libérateur de la démocratie a atteint les régions les plus hermétiques au changement.
Le bloc socialiste a fondu, et l’Europe de l’Est a mué en une multitude de Républiques où démocratie et développement sont devenus des réalités tangibles. Même l’Amérique latine s’est débarrassée des encombrantes juntes militaires qui écrasaient sous leurs bottes les peuples et leurs rêves de liberté.
Partout dans le monde, y compris en Afrique, continent où la maladie du coup d’Etat fait plus de victimes que le sida et la malnutrition réunis, le principe de l’alternance au pouvoir, par la voie des urnes, a fait de nouveaux convertis. Seul l’irréductible monde arabe résiste encore et encore au changement. D’est en ouest, les pays arabes étouffent encore sous des régimes totalitaires faits de pétromonarchies rétrogrades, d’improbables dictatures où le fils hérite du père et d’autocraties bornées.
Des vieux qui gouvernent des jeunes
Portrait du dirigeant arabe : il est très vieux et immensément riche. Il a passé la moitié de sa vie à régner plutôt qu’à gouverner. C’est un spécialiste du bourrage des urnes qui concentre tous les pouvoirs entre ses mains. La télé et les journaux chantent quotidiennement sa clairvoyance, sa magnificence et sa gloire. Il est arrivé au pouvoir sur un char et il ne le quittera que les pieds devant ou chassé par son peuple. L’autre particularité de ces pays est que leur sol est gorgé de gaz et de pétrole.
Ces richesses, pourtant, ne profitent pas aux peuples mais à une caste d’intouchables où l’on retrouve la famille régnante, les apparatchiks du régime et toutes les clientèles qui ont fait leur allégeance au maître du pays. La dernière particularité de ces pays, et ce n’est pas le moindre des paradoxes, et qu’ils sont dirigés par des vieux alors que leur population est composée à plus de 70% de jeunes qui ont moins de 30 ans. Il n’est donc pas étonnant que ce sont ces mêmes jeunes que l’on retrouve à la tête des révoltes et des émeutes qui embrasent actuellement le monde arabe.
Djamel Alilat
Libellés : Maghreb, pays arabes
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