Révision constitutionnelle
< http://www.humanite.fr/L-avenir-incertain-de-la-revision-constitutionnelle > merci à l'ami Gilbert
Le projet de réforme décrypté
À L’ARTICLE 1er DE LA CONSTITUTION (souveraineté)
Est ajouté : « La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales. »
« La loi garantit les expressions pluralistes des opinions et la participation équitable des partis et groupements politiques à la vie démocratique de la nation. »
Notre commentaire.
L’introduction de la parité professionnelle est une vraie avancée, mais elle ne doit rien au gouvernement. Cette disposition, qui ne figurait pas dans le projet de loi, a été introduite par un amendement voté par la gauche et une part de la droite, contre l’avis de la garde des Sceaux, Rachida Dati. La seconde phrase complète simplement l’article 4 sur le rôle des partis, en actant la notion de « pluralisme », à l’initiative des centristes et de la commission des Lois.
À L’ARTICLE 6 (mandat du chef de l’État) :
Le président de la République « ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs ».
À L’ARTICLE 11 (référendum) :
Le président peut soumettre au référendum toutes réformes relatives à la politique « environnementale ».
Un référendum peut être « organisé à l’initiative d’un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales ». Une loi détermine « les conditions de sa présentation ». « Si la proposition de loi n’a pas été examinée par les deux assemblées dans un délai fixé par la loi organique, le président de la République la soumet au référendum. »
Notre commentaire.
C’est le fameux référendum d’ « initiative populaire », bien mal nommé, puisqu’il est en fait « organisé à l’initiative d’un cinquième des membres du Parlement ». Même « soutenue par un dixième des électeurs » (soit plus de quatre millions), la proposition de loi devra d’abord être soumise au Parlement, qui pourra la rejeter, et l’épisode sera clos. C’est seulement au cas où le Parlement « oublierait » de s’en saisir que le référendum aurait lieu, c’est-àdire une possibilité quasi nulle.
À L’ARTICLE 13 (pouvoir de nomination du chef de l’État) :
« Le pouvoir de nomination du président de la République » pour certains emplois ou fonctions « s’exerce après avis public de la commission permanente compétente » de chaque assemblée.
« Le président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l’addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. »
À L’ARTICLE 16 (pouvoirs exceptionnels) :
« Après trente jours d’exercice des pouvoirs exceptionnels, le Conseil constitutionnel peut être saisi par le président de l’Assemblée nationale, le président du Sénat, soixante députés ou soixante sénateurs, aux fins d’examiner si les conditions » demeurent réunies. « Il se prononce dans les délais les plus brefs par un avis public. » Il « se prononce dans les mêmes conditions au terme de soixante jours d’exercice des pouvoirs exceptionnels et à tout moment au-delà de cette durée ».
À L’ARTICLE 17 (droit de grâce) :
Le président de la République a le droit de faire grâce « à titre individuel ».
Notre commentaire.
Outre le fait de ne pouvoir faire « plus de deux mandats consécutifs » (art. 6 ; aucun président n’a été dans ce cas de figure), le président de la République est soumis au « contrôle » par le Parlement de ses nominations. Un « veto » virtuel, puisqu’il faut le vote des trois cinquièmes des commissions, impossible sans l’aval de la majorité en place, toute dévouée au chef de l’État. Les « pouvoirs exceptionnels » demeurent en place, sans aucun contrôle durant deux mois.
À L’ARTICLE 18 (message du chef de l’État au Parlement) :
Le président de la République « peut prendre la parole devant le Parlement réuni à cet effet en congrès. Sa déclaration peut donner lieu, hors sa présence, à un débat qui ne fait l’objet d’aucun vote ».
Notre commentaire.
C’est le véritable motif de la réforme. Il entérine la volonté du président de venir s’exprimer au Parlement, au mépris du principe démocratique de séparation des pouvoirs. Dans les faits, le chef de l’État se substitue ainsi au premier ministre pour les déclarations de politique générale, mais, alors que celui-ci était responsable devant le Parlement, qui vote sur sa déclaration, le chef de l’État demeure intouchable (interdiction de lui répondre et de voter), alors qu’il conserve le pouvoir de dissolution de l’Assemblée (art. 12).
À L’ARTICLE 24 (composition du Parlement) :
Le Parlement « contrôle l’action du gouvernement. Il évalue les politiques publiques ». Le nombre des députés « ne peut excéder 577 ». Le Sénat « ne peut excéder 348 » membres, élus « au suffrage indirect ». Il « assure la représentation des collectivités territoriales de la République ». « Les Français établis hors de France sont représentés à l’Assemblée nationale et au Sénat. »
Notre commentaire.
Derrière cet article se cache le refus du Sénat de réformer son mode de scrutin, qui garantit une majorité inamovible à la droite grâce à une répartition des grands électeurs particulièrement injuste. Les sénateurs ont fait retirer du projet la seule mention qui ouvrait la voie à un scrutin plus équitable (« le Sénat représente les collectivités en tenant compte de leur population »). Des sièges spécifiques de députés seront créés (douze) pour les Français de l’étranger, corps électoral traditionnellement favorable à la droite, au détriment des circonscriptions traditionnelles, le nombre de députés étant limité à 577.
À L’ARTICLE 25 (éligibilité des parlementaires) :
La loi prévoit le « remplacement temporaire » des députés et sénateurs ayant accepté des « fonctions gouvernementales ».
Une « commission indépendante » se prononce sur les projets de redécoupage des « circonscriptions pour l’élection des députés ou modifiant la répartition des sièges de députés ou de sénateurs ».
À L’ARTICLE 34 (rôle de la loi) :
La loi fixe les règles concernant « le pluralisme et l’indépendance des médias ».
Les orientations pluriannuelles des finances publiques « s’inscrivent dans l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques ».
ARTICLE34-1 (nouveau) :
Les assemblées « peuvent voter des résolutions ».
Notre commentaire. Le droit de voter des « résolutions » (art. 34-1) est cosmétique, puisqu’elles n’ont aucune valeur contraignante.
L’équilibre des comptes publics, qui relève des choix politiques décidés par les gouvernements, est en revanche constitutionnalisé (art. 34), à la manière du pacte d’austérité budgétaire dans les traités européens. Enfin, le gouvernement et l’UMP n’ont pas attendu la « commission indépendante » promise pour le redécoupage des circonscriptions, déjà en chantier (art. 25).
À L’ARTICLE 35 (déclaration de guerre) :
Le gouvernement « informe le Parlement de sa décision de faire intervenir les forces armées à l’étranger » dans les « trois jours après le début de l’intervention ». « Cette information peut donner lieu à un débat qui n’est suivi d’aucun vote. Lorsque la durée de l’intervention excède quatre mois, le gouvernement soumet sa prolongation à l’autorisation du Parlement. »
Notre commentaire.
Les interventions armées à étranger ne seront pas votées par le Parlement, mais seulement leur prolongation au bout de quatre mois, et rien au-delà. Cela permet de contourner la disposition, toujours en vigueur, qui dit que « la déclaration de guerre est autorisée par le Parlement ».
À L’ARTICLE 38 (ordonnances) :
Les ordonnances prises par le gouvernement « ne peuvent être ratifiées que de manière expresse ».
À L’ARTICLE 39 (examen des lois) :
Le président de l’assemblée saisie d’un texte ou le premier ministre « peut saisir le Conseil constitutionnel » en cas de désaccord sur la régularité de l’inscription d’un texte à l’ordre du jour. « Le président d’une assemblée peut soumettre pour avis au Conseil d’État » une proposition de loi « déposée par l’un des membres de cette assemblée, sauf si ce dernier s’y oppose ».
À L’ARTICLE 41 (recevabilité des lois) :
« Le président de l’assemblée saisie » peut opposer l’irrecevabilité à un amendement ou une proposition de loi.
À L’ARTICLE 42 (discussion des lois) :
En première lecture, « la discussion des projets et des propositions de loi porte, en séance, sur le texte adopté par la commission » sauf révisions constitutionnelles, lois de finances et de financement de la Sécurité sociale.
« La discussion en séance, en première lecture, d’un projet ou d’une proposition de loi ne peut intervenir, devant la première assemblée saisie, qu’à l’expiration d’un délai de six semaines. »
Elle ne peut intervenir « devant la seconde assemblée saisie qu’à l’expiration d’un délai de quatre semaines à compter de sa transmission », sauf « procédure accélérée » (voir article 45).
À L’ARTICLE 43 (commissions parlementaires) :
Le nombre des commissions permanentes « est limité à huit dans chaque assemblée » au lieu de six.
À L’ARTICLE 44 (droit d’amendement) :
« Ce droit s’exerce en séance ou en commission selon les conditions fixées par les règlements des assemblées, dans le cadre déterminé par une loi organique. »
Notre commentaire.
Les « nouveaux droits » du Parlement sont un leurre, puisqu’il s’agit pour l’essentiel de nouveaux droits pour la majorité du Parlement. La plus significative est la limitation du droit d’amendement (art. 44), seul pouvoir réel des parlementaires pour avoir prise sur les textes et, le cas échéant, s’y opposer. Celui-ci sera désormais borné par le règlement et la loi, pour éviter les cas d’ « obstruction » de l’opposition. Dans les faits, cela se traduira par une « durée programmée d’examen des textes », conçue comme « une mesure d’accompagnement du resserrement de l’article 49-3 », en d’autres termes : l’instauration d’un véritable 49-3 d’origine parlementaire qui permettra au président d’une assemblée de couper court au débat si un texte rencontre une trop forte opposition. Cette atteinte aux droits des élus est indissociable de la discussion en séance de textes déjà amendés par les commissions (art. 42). Le projet de loi confirme ainsi que « le travail en commission sera, dans cette hypothèse, soumis à une simple ratification par l’assemblée plénière ».
À L’ARTICLE 45 (procédure accélérée) :
Tout amendement est recevable en première lecture « dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ».
La déclaration d’urgence, rebaptisée « procédure accélérée », est engagée par le gouvernement « sans que les conférences des présidents s’y soient conjointement opposées ».
À L’ARTICLE 46 (lois organiques) :
Elles ne peuvent être examinées et votées « qu’à l’expiration des délais fixés » à l’article 42.
ARTICLE47-2 (nouveau) :
« La Cour des comptes assiste le Parlement dans le contrôle de l’action du gouvernement », ainsi que « dans l’évaluation des politiques publiques ».
À L’ARTICLE 48 (ordre du jour du Parlement) :
« L’ordre du jour est fixé par chaque assemblée. Deux semaines de séance sur quatre sont réservées par priorité » aux textes du gouvernement. En outre, « l’examen des projets de loi de finances, des projets de loi de financement de la Sécurité sociale » ont « priorité ». « Un jour de séance par mois est réservé à un ordre du jour des groupes d’opposition » et « des groupes minoritaires ».
Notre commentaire.
L’ordre du jour partagé le sera en fait entre le gouvernement et sa majorité (deux semaines sur quatre chacun, sans compter les lois de finances ayant « priorité »). Les différents groupes d’opposition devront se contenter à eux tous de moins d’un jour par mois, puisqu’il devra être partagé aussi avec les « groupes minoritaires » de la majorité comme le Nouveau Centre.À L’ARTICLE 49-3 (engagement de responsabilité du gouvernement) :
Elle peut être engagée sur le vote d’un « projet de loi de finances ou de financement de la Sécurité sociale ». « Le premier ministre peut, en outre, recourir à cette procédure pour un autre projet ou une proposition de loi par session. »
Notre commentaire.
La « restriction » annoncée du 49-3 (adoption d’une loi sans vote par décision du gouvernement) n’aura pas lieu. L’article ne fait qu’entériner la situation actuelle, le gouvernement n’employant jamais le 49-3 trois fois par session. De plus, avec l’instauration d’un 49-3 d’origine parlementaire qui limite le droit d’amendement (voir le commentaire précédent), le gouvernement n’aura plus besoin d’y recourir quand l’opposition retarde les débats, comme sur le CPE.
ARTICLE50-1 (nouveau) :
« Devant l’une ou l’autre des assemblées », le gouvernement peut « faire, sur un sujet déterminé, une déclaration qui donne lieu à débat et peut, s’il le décide, faire l’objet d’un vote sans engager sa responsabilité ».
ARTICLES51-1 ET 51-2 (nouveaux) :
Le règlement de chaque assemblée « reconnaît des droits spécifiques aux groupes d’opposition de l’assemblée intéressée ainsi qu’aux groupes minoritaires ».
Pour l’exercice des missions de contrôle et d’évaluation, « des commissions d’enquête peuvent être créées au sein de chaque assemblée ».
Notre commentaire.
Ces articles servent d’appât à la droite pour espérer débaucher des élus de gauche au Congrès. Les propositions de Sarkozy dans le Monde s’inscrivent dans ce cadre. Mais n’étant pas du domaine de la Constitution, elles sont renvoyées aux règlements des assemblées, qui restent à réécrire. Le chef de l’État demande donc un chèque en blanc aux parlementaires, d’autant qu’il ne lui appartient pas de décider du règlement des assemblées, qu’elles seules déterminent. Rien ne garantit que les propositions, qu’il conditionne à l’adoption de la réforme, seront appliquées.
À L’ARTICLE 56 (Conseil constitutionnel) :
Le contrôle des nominations est applicable à celles effectuées au Conseil constitutionnel.
À L’ARTICLE 61 (idem) :
« Les propositions de loi » pouvant faire l’objet du droit d’initiative référendaire prévu à l’article 11 sont soumises au Conseil constitutionnel « avant qu’elles ne soient soumises au référendum ».
ARTICLE61-1 (nouveau) :
Dans le cadre d’une procédure judiciaire, le Conseil constitutionnel peut être saisi lorsqu’ « il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit ».
À L’ARTICLE 62 (inconstitutionnalité) :
« Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1 est abrogée. »
« Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d’être remis en cause. »
Notre commentaire.
L’article 61-1 permet aux citoyens de saisir, dans le cadre d’une procédure judiciaire, le Conseil constitutionnel pour contester une loi qui porterait atteinte aux droits et libertés. En vigueur dans d’autres pays européens, cette mesure n’a pas fait la preuve de son efficacité. Primo, il y a peu de chances pour que le Conseil constitutionnel, dont les membres sont nommés par les cercles du pouvoir, se déjuge sur une loi déjà votée, ou contredise le gouvernement. Secundo, le Conseil constitutionnel peut décider de ne pas remettre en cause les effets d’une loi jugée par lui inconstitutionnelle (art. 62).
À L’ARTICLE 65 (CSM) :
« La formation compétente » du Conseil supérieur de la magistrature à l’égard des magistrats du siège « est présidée par le premier président de la Cour de cassation ». Elle comprend « cinq magistrats du siège et un magistrat du parquet, un conseiller d’État désigné par le Conseil d’État, un avocat ainsi que six personnalités qualifiées qui n’appartiennent ni au Parlement, ni à l’ordre judiciaire, ni à l’ordre administratif. Le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat désignent chacun deux personnalités qualifiées ».
« La formation compétente à l’égard des magistrats du parquet est présidée par le procureur général près la Cour de cassation. Elle comprend, en outre, cinq magistrats du parquet et un magistrat du siège, ainsi que le conseiller d’État, l’avocat et les six personnalités qualifiées mentionnés. »
« Le Conseil supérieur de la magistrature se réunit en formation plénière pour répondre aux demandes d’avis » du président de la République.
« Le Conseil supérieur de la magistrature peut être saisi par un justiciable dans les conditions fixées par une loi organique. »
Notre commentaire.
Les syndicats de magistrats et le CSM luimême contestent vigoureusement cette réforme, estimant qu’elle met en péril l’indépendance de la justice. Les personnalités extérieures nommées par le pouvoir politique y seront désormais majoritaires, au détriment des magistrats. Le Syndicat de la magistrature (SM) estime que cela revient à politiser l’institution, en la soumettant au « fait majoritaire », menaçant ainsi « l’équilibre démocratique ».
À L’ARTICLE 69 (CES) :
Le « Conseil économique et social » est renommé « Conseil économique, social et environnemental ». Il peut être « saisi par voie de pétition dans les conditions fixées par une loi organique ». Il fait connaître « les suites qu’il propose d’y donner. »
À L’ARTICLE 70 (idem) :
Le CES peut être consulté par le gouvernement et « le Parlement ». Le gouvernement peut « également le consulter » sur les « orientations pluriannuelles des finances publiques ».
À L’ARTICLE 71 (idem) :
Le nombre de membres du CES « ne peut excéder 233 ».
ARTICLE71-1 (nouveau) :
Un « défenseur des droits » est créé. Il peut être saisi par « toute personne s’estimant lésée par le fonctionnement d’un service public », d’une administration de l’État, d’une collectivité territoriale, d’un établissement public, ainsi que par « tout organisme investi d’une mission de service public ». Le défenseur des droits « est nommé par le président de la République pour un mandat de six ans non renouvelable ».
Notre commentaire.
Le défenseur des droits reprendra, pour l’instant, la mission du médiateur de la République, mais sa saisie en direct n’est pas sans faire craindre un engorgement de la procédure. Le gouvernement réfléchit à réunir sous l’autorité de ce défenseur la Commission nationale de déontologie de la sécurité, le contrôleur général des prisons, voire la CNIL, la HALDE et la défenseure des enfants. Il est illusoire d’espérer que cette nouvelle agence « indépendante » disposera de moyens équivalents à ceux cumulés des diverses instances actuelles. Sans compter qu’a été mise aux oubliettes l’idée d’un défenseur des droits fondamentaux, qui avait, au moins, l’avantage de reconnaître que même les étrangers ont des droits.
AUX ARTICLES 72-3, 73, 74-1 (outre-mer) :
Diverses adaptations de la Constitution à l’évolution du droit des collectivités d’outremer (nouveaux statuts de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, statut de Clipperton, etc.).
ARTICLE87 (nouveau) :
« De la francophonie » : la République « participe au développement de la solidarité et de la coopération entre les États et les peuples ayant le français en partage ».
À L’ARTICLE 88-4 (Union européenne) :
Le gouvernement soumet au Parlement tous « les projets ou propositions d’actes » de l’UE. Des résolutions européennes peuvent être adoptées sur ces projets « ainsi que sur tout document émanant d’une institution de l’UE ».
Au sein de chaque assemblée parlementaire « est instituée une commission chargée des Affaires européennes. »
À L’ARTICLE 88-5 (adhésions à l’UE) :
Tout traité relatif à l’adhésion d’un État à l’UE (acceptée après le 1er juillet 2004 par le Conseil européen) est « soumis au référendum par le président de la République ». Toutefois, le vote d’une motion adoptée « par chaque assemblée à la majorité des trois cinquièmes » peut autoriser la ratification sans référendum.
NB : la rédaction des articles 88-4 et 88-5 est modifiée « à compter de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne ».
À L’ARTICLE 88-6 (Cour de justice de l’UE) :
Chaque assemblée « peut former un recours devant la Cour de justice de l’UE contre un acte législatif européen pour violation du principe de subsidiarité ». « À la demande de soixante députés ou de soixante sénateurs, le recours est de droit. »
NB : l’entrée en vigueur de cet article est prévue en même temps que celle du traité de Lisbonne.
À L’ARTICLE 89 (révision) :
Les révisions constitutionnelles votées par le Parlement doivent l’être dans le respect des délais fixés à l’article 42.
Notre commentaire.
Le Parlement peut voter des résolutions sur des projets européens (c’était déjà le cas) mais elles n’ont pas de valeur contraignante (art. 88-4). Impossible donc de s’opposer concrètement à des directives nuisibles aux services publics ou aux droits des salariés. Le référendum pour les nouvelles adhésions à l’UE n’est plus obligatoire si les assemblées en décident (art. 88-5), ce qui permettra de ne l’utiliser que pour la Turquie. L’article 88-1 maintient que la France peut participer à l’UE « dans les conditions prévues par le traité de Lisbonne », en dépit du « non » irlandais qui le rend caduc.
Décryptage réalisé par Sébastien Crépel avec Émilie Rive pour l’Humanité du Vendredi 18 Juillet 2008.
< http://www.humanite.fr/L-avenir-incertain-de-la-revision-constitutionnelle > merci à l'ami Gilbert
Le projet de réforme décrypté
À L’ARTICLE 1er DE LA CONSTITUTION (souveraineté)
Est ajouté : « La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales. »
« La loi garantit les expressions pluralistes des opinions et la participation équitable des partis et groupements politiques à la vie démocratique de la nation. »
Notre commentaire.
L’introduction de la parité professionnelle est une vraie avancée, mais elle ne doit rien au gouvernement. Cette disposition, qui ne figurait pas dans le projet de loi, a été introduite par un amendement voté par la gauche et une part de la droite, contre l’avis de la garde des Sceaux, Rachida Dati. La seconde phrase complète simplement l’article 4 sur le rôle des partis, en actant la notion de « pluralisme », à l’initiative des centristes et de la commission des Lois.
À L’ARTICLE 6 (mandat du chef de l’État) :
Le président de la République « ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs ».
À L’ARTICLE 11 (référendum) :
Le président peut soumettre au référendum toutes réformes relatives à la politique « environnementale ».
Un référendum peut être « organisé à l’initiative d’un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales ». Une loi détermine « les conditions de sa présentation ». « Si la proposition de loi n’a pas été examinée par les deux assemblées dans un délai fixé par la loi organique, le président de la République la soumet au référendum. »
Notre commentaire.
C’est le fameux référendum d’ « initiative populaire », bien mal nommé, puisqu’il est en fait « organisé à l’initiative d’un cinquième des membres du Parlement ». Même « soutenue par un dixième des électeurs » (soit plus de quatre millions), la proposition de loi devra d’abord être soumise au Parlement, qui pourra la rejeter, et l’épisode sera clos. C’est seulement au cas où le Parlement « oublierait » de s’en saisir que le référendum aurait lieu, c’est-àdire une possibilité quasi nulle.
À L’ARTICLE 13 (pouvoir de nomination du chef de l’État) :
« Le pouvoir de nomination du président de la République » pour certains emplois ou fonctions « s’exerce après avis public de la commission permanente compétente » de chaque assemblée.
« Le président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l’addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. »
À L’ARTICLE 16 (pouvoirs exceptionnels) :
« Après trente jours d’exercice des pouvoirs exceptionnels, le Conseil constitutionnel peut être saisi par le président de l’Assemblée nationale, le président du Sénat, soixante députés ou soixante sénateurs, aux fins d’examiner si les conditions » demeurent réunies. « Il se prononce dans les délais les plus brefs par un avis public. » Il « se prononce dans les mêmes conditions au terme de soixante jours d’exercice des pouvoirs exceptionnels et à tout moment au-delà de cette durée ».
À L’ARTICLE 17 (droit de grâce) :
Le président de la République a le droit de faire grâce « à titre individuel ».
Notre commentaire.
Outre le fait de ne pouvoir faire « plus de deux mandats consécutifs » (art. 6 ; aucun président n’a été dans ce cas de figure), le président de la République est soumis au « contrôle » par le Parlement de ses nominations. Un « veto » virtuel, puisqu’il faut le vote des trois cinquièmes des commissions, impossible sans l’aval de la majorité en place, toute dévouée au chef de l’État. Les « pouvoirs exceptionnels » demeurent en place, sans aucun contrôle durant deux mois.
À L’ARTICLE 18 (message du chef de l’État au Parlement) :
Le président de la République « peut prendre la parole devant le Parlement réuni à cet effet en congrès. Sa déclaration peut donner lieu, hors sa présence, à un débat qui ne fait l’objet d’aucun vote ».
Notre commentaire.
C’est le véritable motif de la réforme. Il entérine la volonté du président de venir s’exprimer au Parlement, au mépris du principe démocratique de séparation des pouvoirs. Dans les faits, le chef de l’État se substitue ainsi au premier ministre pour les déclarations de politique générale, mais, alors que celui-ci était responsable devant le Parlement, qui vote sur sa déclaration, le chef de l’État demeure intouchable (interdiction de lui répondre et de voter), alors qu’il conserve le pouvoir de dissolution de l’Assemblée (art. 12).
À L’ARTICLE 24 (composition du Parlement) :
Le Parlement « contrôle l’action du gouvernement. Il évalue les politiques publiques ». Le nombre des députés « ne peut excéder 577 ». Le Sénat « ne peut excéder 348 » membres, élus « au suffrage indirect ». Il « assure la représentation des collectivités territoriales de la République ». « Les Français établis hors de France sont représentés à l’Assemblée nationale et au Sénat. »
Notre commentaire.
Derrière cet article se cache le refus du Sénat de réformer son mode de scrutin, qui garantit une majorité inamovible à la droite grâce à une répartition des grands électeurs particulièrement injuste. Les sénateurs ont fait retirer du projet la seule mention qui ouvrait la voie à un scrutin plus équitable (« le Sénat représente les collectivités en tenant compte de leur population »). Des sièges spécifiques de députés seront créés (douze) pour les Français de l’étranger, corps électoral traditionnellement favorable à la droite, au détriment des circonscriptions traditionnelles, le nombre de députés étant limité à 577.
À L’ARTICLE 25 (éligibilité des parlementaires) :
La loi prévoit le « remplacement temporaire » des députés et sénateurs ayant accepté des « fonctions gouvernementales ».
Une « commission indépendante » se prononce sur les projets de redécoupage des « circonscriptions pour l’élection des députés ou modifiant la répartition des sièges de députés ou de sénateurs ».
À L’ARTICLE 34 (rôle de la loi) :
La loi fixe les règles concernant « le pluralisme et l’indépendance des médias ».
Les orientations pluriannuelles des finances publiques « s’inscrivent dans l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques ».
ARTICLE34-1 (nouveau) :
Les assemblées « peuvent voter des résolutions ».
Notre commentaire. Le droit de voter des « résolutions » (art. 34-1) est cosmétique, puisqu’elles n’ont aucune valeur contraignante.
L’équilibre des comptes publics, qui relève des choix politiques décidés par les gouvernements, est en revanche constitutionnalisé (art. 34), à la manière du pacte d’austérité budgétaire dans les traités européens. Enfin, le gouvernement et l’UMP n’ont pas attendu la « commission indépendante » promise pour le redécoupage des circonscriptions, déjà en chantier (art. 25).
À L’ARTICLE 35 (déclaration de guerre) :
Le gouvernement « informe le Parlement de sa décision de faire intervenir les forces armées à l’étranger » dans les « trois jours après le début de l’intervention ». « Cette information peut donner lieu à un débat qui n’est suivi d’aucun vote. Lorsque la durée de l’intervention excède quatre mois, le gouvernement soumet sa prolongation à l’autorisation du Parlement. »
Notre commentaire.
Les interventions armées à étranger ne seront pas votées par le Parlement, mais seulement leur prolongation au bout de quatre mois, et rien au-delà. Cela permet de contourner la disposition, toujours en vigueur, qui dit que « la déclaration de guerre est autorisée par le Parlement ».
À L’ARTICLE 38 (ordonnances) :
Les ordonnances prises par le gouvernement « ne peuvent être ratifiées que de manière expresse ».
À L’ARTICLE 39 (examen des lois) :
Le président de l’assemblée saisie d’un texte ou le premier ministre « peut saisir le Conseil constitutionnel » en cas de désaccord sur la régularité de l’inscription d’un texte à l’ordre du jour. « Le président d’une assemblée peut soumettre pour avis au Conseil d’État » une proposition de loi « déposée par l’un des membres de cette assemblée, sauf si ce dernier s’y oppose ».
À L’ARTICLE 41 (recevabilité des lois) :
« Le président de l’assemblée saisie » peut opposer l’irrecevabilité à un amendement ou une proposition de loi.
À L’ARTICLE 42 (discussion des lois) :
En première lecture, « la discussion des projets et des propositions de loi porte, en séance, sur le texte adopté par la commission » sauf révisions constitutionnelles, lois de finances et de financement de la Sécurité sociale.
« La discussion en séance, en première lecture, d’un projet ou d’une proposition de loi ne peut intervenir, devant la première assemblée saisie, qu’à l’expiration d’un délai de six semaines. »
Elle ne peut intervenir « devant la seconde assemblée saisie qu’à l’expiration d’un délai de quatre semaines à compter de sa transmission », sauf « procédure accélérée » (voir article 45).
À L’ARTICLE 43 (commissions parlementaires) :
Le nombre des commissions permanentes « est limité à huit dans chaque assemblée » au lieu de six.
À L’ARTICLE 44 (droit d’amendement) :
« Ce droit s’exerce en séance ou en commission selon les conditions fixées par les règlements des assemblées, dans le cadre déterminé par une loi organique. »
Notre commentaire.
Les « nouveaux droits » du Parlement sont un leurre, puisqu’il s’agit pour l’essentiel de nouveaux droits pour la majorité du Parlement. La plus significative est la limitation du droit d’amendement (art. 44), seul pouvoir réel des parlementaires pour avoir prise sur les textes et, le cas échéant, s’y opposer. Celui-ci sera désormais borné par le règlement et la loi, pour éviter les cas d’ « obstruction » de l’opposition. Dans les faits, cela se traduira par une « durée programmée d’examen des textes », conçue comme « une mesure d’accompagnement du resserrement de l’article 49-3 », en d’autres termes : l’instauration d’un véritable 49-3 d’origine parlementaire qui permettra au président d’une assemblée de couper court au débat si un texte rencontre une trop forte opposition. Cette atteinte aux droits des élus est indissociable de la discussion en séance de textes déjà amendés par les commissions (art. 42). Le projet de loi confirme ainsi que « le travail en commission sera, dans cette hypothèse, soumis à une simple ratification par l’assemblée plénière ».
À L’ARTICLE 45 (procédure accélérée) :
Tout amendement est recevable en première lecture « dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ».
La déclaration d’urgence, rebaptisée « procédure accélérée », est engagée par le gouvernement « sans que les conférences des présidents s’y soient conjointement opposées ».
À L’ARTICLE 46 (lois organiques) :
Elles ne peuvent être examinées et votées « qu’à l’expiration des délais fixés » à l’article 42.
ARTICLE47-2 (nouveau) :
« La Cour des comptes assiste le Parlement dans le contrôle de l’action du gouvernement », ainsi que « dans l’évaluation des politiques publiques ».
À L’ARTICLE 48 (ordre du jour du Parlement) :
« L’ordre du jour est fixé par chaque assemblée. Deux semaines de séance sur quatre sont réservées par priorité » aux textes du gouvernement. En outre, « l’examen des projets de loi de finances, des projets de loi de financement de la Sécurité sociale » ont « priorité ». « Un jour de séance par mois est réservé à un ordre du jour des groupes d’opposition » et « des groupes minoritaires ».
Notre commentaire.
L’ordre du jour partagé le sera en fait entre le gouvernement et sa majorité (deux semaines sur quatre chacun, sans compter les lois de finances ayant « priorité »). Les différents groupes d’opposition devront se contenter à eux tous de moins d’un jour par mois, puisqu’il devra être partagé aussi avec les « groupes minoritaires » de la majorité comme le Nouveau Centre.À L’ARTICLE 49-3 (engagement de responsabilité du gouvernement) :
Elle peut être engagée sur le vote d’un « projet de loi de finances ou de financement de la Sécurité sociale ». « Le premier ministre peut, en outre, recourir à cette procédure pour un autre projet ou une proposition de loi par session. »
Notre commentaire.
La « restriction » annoncée du 49-3 (adoption d’une loi sans vote par décision du gouvernement) n’aura pas lieu. L’article ne fait qu’entériner la situation actuelle, le gouvernement n’employant jamais le 49-3 trois fois par session. De plus, avec l’instauration d’un 49-3 d’origine parlementaire qui limite le droit d’amendement (voir le commentaire précédent), le gouvernement n’aura plus besoin d’y recourir quand l’opposition retarde les débats, comme sur le CPE.
ARTICLE50-1 (nouveau) :
« Devant l’une ou l’autre des assemblées », le gouvernement peut « faire, sur un sujet déterminé, une déclaration qui donne lieu à débat et peut, s’il le décide, faire l’objet d’un vote sans engager sa responsabilité ».
ARTICLES51-1 ET 51-2 (nouveaux) :
Le règlement de chaque assemblée « reconnaît des droits spécifiques aux groupes d’opposition de l’assemblée intéressée ainsi qu’aux groupes minoritaires ».
Pour l’exercice des missions de contrôle et d’évaluation, « des commissions d’enquête peuvent être créées au sein de chaque assemblée ».
Notre commentaire.
Ces articles servent d’appât à la droite pour espérer débaucher des élus de gauche au Congrès. Les propositions de Sarkozy dans le Monde s’inscrivent dans ce cadre. Mais n’étant pas du domaine de la Constitution, elles sont renvoyées aux règlements des assemblées, qui restent à réécrire. Le chef de l’État demande donc un chèque en blanc aux parlementaires, d’autant qu’il ne lui appartient pas de décider du règlement des assemblées, qu’elles seules déterminent. Rien ne garantit que les propositions, qu’il conditionne à l’adoption de la réforme, seront appliquées.
À L’ARTICLE 56 (Conseil constitutionnel) :
Le contrôle des nominations est applicable à celles effectuées au Conseil constitutionnel.
À L’ARTICLE 61 (idem) :
« Les propositions de loi » pouvant faire l’objet du droit d’initiative référendaire prévu à l’article 11 sont soumises au Conseil constitutionnel « avant qu’elles ne soient soumises au référendum ».
ARTICLE61-1 (nouveau) :
Dans le cadre d’une procédure judiciaire, le Conseil constitutionnel peut être saisi lorsqu’ « il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit ».
À L’ARTICLE 62 (inconstitutionnalité) :
« Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1 est abrogée. »
« Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d’être remis en cause. »
Notre commentaire.
L’article 61-1 permet aux citoyens de saisir, dans le cadre d’une procédure judiciaire, le Conseil constitutionnel pour contester une loi qui porterait atteinte aux droits et libertés. En vigueur dans d’autres pays européens, cette mesure n’a pas fait la preuve de son efficacité. Primo, il y a peu de chances pour que le Conseil constitutionnel, dont les membres sont nommés par les cercles du pouvoir, se déjuge sur une loi déjà votée, ou contredise le gouvernement. Secundo, le Conseil constitutionnel peut décider de ne pas remettre en cause les effets d’une loi jugée par lui inconstitutionnelle (art. 62).
À L’ARTICLE 65 (CSM) :
« La formation compétente » du Conseil supérieur de la magistrature à l’égard des magistrats du siège « est présidée par le premier président de la Cour de cassation ». Elle comprend « cinq magistrats du siège et un magistrat du parquet, un conseiller d’État désigné par le Conseil d’État, un avocat ainsi que six personnalités qualifiées qui n’appartiennent ni au Parlement, ni à l’ordre judiciaire, ni à l’ordre administratif. Le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat désignent chacun deux personnalités qualifiées ».
« La formation compétente à l’égard des magistrats du parquet est présidée par le procureur général près la Cour de cassation. Elle comprend, en outre, cinq magistrats du parquet et un magistrat du siège, ainsi que le conseiller d’État, l’avocat et les six personnalités qualifiées mentionnés. »
« Le Conseil supérieur de la magistrature se réunit en formation plénière pour répondre aux demandes d’avis » du président de la République.
« Le Conseil supérieur de la magistrature peut être saisi par un justiciable dans les conditions fixées par une loi organique. »
Notre commentaire.
Les syndicats de magistrats et le CSM luimême contestent vigoureusement cette réforme, estimant qu’elle met en péril l’indépendance de la justice. Les personnalités extérieures nommées par le pouvoir politique y seront désormais majoritaires, au détriment des magistrats. Le Syndicat de la magistrature (SM) estime que cela revient à politiser l’institution, en la soumettant au « fait majoritaire », menaçant ainsi « l’équilibre démocratique ».
À L’ARTICLE 69 (CES) :
Le « Conseil économique et social » est renommé « Conseil économique, social et environnemental ». Il peut être « saisi par voie de pétition dans les conditions fixées par une loi organique ». Il fait connaître « les suites qu’il propose d’y donner. »
À L’ARTICLE 70 (idem) :
Le CES peut être consulté par le gouvernement et « le Parlement ». Le gouvernement peut « également le consulter » sur les « orientations pluriannuelles des finances publiques ».
À L’ARTICLE 71 (idem) :
Le nombre de membres du CES « ne peut excéder 233 ».
ARTICLE71-1 (nouveau) :
Un « défenseur des droits » est créé. Il peut être saisi par « toute personne s’estimant lésée par le fonctionnement d’un service public », d’une administration de l’État, d’une collectivité territoriale, d’un établissement public, ainsi que par « tout organisme investi d’une mission de service public ». Le défenseur des droits « est nommé par le président de la République pour un mandat de six ans non renouvelable ».
Notre commentaire.
Le défenseur des droits reprendra, pour l’instant, la mission du médiateur de la République, mais sa saisie en direct n’est pas sans faire craindre un engorgement de la procédure. Le gouvernement réfléchit à réunir sous l’autorité de ce défenseur la Commission nationale de déontologie de la sécurité, le contrôleur général des prisons, voire la CNIL, la HALDE et la défenseure des enfants. Il est illusoire d’espérer que cette nouvelle agence « indépendante » disposera de moyens équivalents à ceux cumulés des diverses instances actuelles. Sans compter qu’a été mise aux oubliettes l’idée d’un défenseur des droits fondamentaux, qui avait, au moins, l’avantage de reconnaître que même les étrangers ont des droits.
AUX ARTICLES 72-3, 73, 74-1 (outre-mer) :
Diverses adaptations de la Constitution à l’évolution du droit des collectivités d’outremer (nouveaux statuts de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, statut de Clipperton, etc.).
ARTICLE87 (nouveau) :
« De la francophonie » : la République « participe au développement de la solidarité et de la coopération entre les États et les peuples ayant le français en partage ».
À L’ARTICLE 88-4 (Union européenne) :
Le gouvernement soumet au Parlement tous « les projets ou propositions d’actes » de l’UE. Des résolutions européennes peuvent être adoptées sur ces projets « ainsi que sur tout document émanant d’une institution de l’UE ».
Au sein de chaque assemblée parlementaire « est instituée une commission chargée des Affaires européennes. »
À L’ARTICLE 88-5 (adhésions à l’UE) :
Tout traité relatif à l’adhésion d’un État à l’UE (acceptée après le 1er juillet 2004 par le Conseil européen) est « soumis au référendum par le président de la République ». Toutefois, le vote d’une motion adoptée « par chaque assemblée à la majorité des trois cinquièmes » peut autoriser la ratification sans référendum.
NB : la rédaction des articles 88-4 et 88-5 est modifiée « à compter de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne ».
À L’ARTICLE 88-6 (Cour de justice de l’UE) :
Chaque assemblée « peut former un recours devant la Cour de justice de l’UE contre un acte législatif européen pour violation du principe de subsidiarité ». « À la demande de soixante députés ou de soixante sénateurs, le recours est de droit. »
NB : l’entrée en vigueur de cet article est prévue en même temps que celle du traité de Lisbonne.
À L’ARTICLE 89 (révision) :
Les révisions constitutionnelles votées par le Parlement doivent l’être dans le respect des délais fixés à l’article 42.
Notre commentaire.
Le Parlement peut voter des résolutions sur des projets européens (c’était déjà le cas) mais elles n’ont pas de valeur contraignante (art. 88-4). Impossible donc de s’opposer concrètement à des directives nuisibles aux services publics ou aux droits des salariés. Le référendum pour les nouvelles adhésions à l’UE n’est plus obligatoire si les assemblées en décident (art. 88-5), ce qui permettra de ne l’utiliser que pour la Turquie. L’article 88-1 maintient que la France peut participer à l’UE « dans les conditions prévues par le traité de Lisbonne », en dépit du « non » irlandais qui le rend caduc.
Décryptage réalisé par Sébastien Crépel avec Émilie Rive pour l’Humanité du Vendredi 18 Juillet 2008.
Libellés : révision constitutionnelle
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire
Abonnement Publier les commentaires [Atom]
<< Accueil