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Lieu : Avignon, Vaucluse, France

jeudi 3 février 2011

L’armée algérienne et le défi démocratique

Face à un dilemme historique


http://www.elwatan.com/dossier/face-a-un-dilemme-historique-03-02-2011-110023_151.php


En décidant d’interdire la marche populaire que prévoit d’organiser la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD), le 12 février à Alger, d’écarter tout projet d’une levée, à moyen terme, de l’état d’urgence et de renvoyer aux calendes grecques l’ouverture des champs politique et médiatique, le gouvernement semble prêt à engager une épreuve de force avec la société.La question qui se pose aujourd’hui avec acuité, c’est de savoir de quel côté se rangera l’armée si la population algérienne décide,
à l’instar des Tunisiens et des Egyptiens, de sortir massivement dans la rue.

Ce bras de fer qui est de ce fait inéluctable peut vraisemblablement déboucher sur un scénario à la tunisienne ou à l’égyptienne tant la population paraît prête aussi à en découdre et nourrit un profond rejet du système et des hommes qui l’incarnent, à l’image du chef de l’Etat, du Premier ministre, de nombreux ministres ou encore de certains hauts et vieux gradés des services de sécurité.

La question qui se pose avec acuité et qui commence d’ailleurs aujourd’hui à revenir sur toutes les lèvres, c’est de savoir de quel côté se rangera l’armée et ses services secrets si la population algérienne décide, à l’instar des Tunisiens et des Egyptiens, de sortir massivement dans la rue pour siffler la fin de la partie et demander le départ, manu militari, du régime et de ses sous-traitants. La question mérite d’être posée surtout si le pouvoir politique incarné par Abdelaziz Bouteflika, Ahmed Ouyahia ou Noureddine Yazid Zerhouni, lui demande de réprimer sans ménagement les manifestants. Cela, quitte à provoquer un horrible bain de sang. Les officiers de l’ANP accepteront-ils, à ce moment là, de prendre sur eux la responsabilité de tirer à balles réelles sur la jeunesse, de tuer l’espoir de toute une société et d’avoir les mains tachées de sang comme l’ont eu d’ailleurs à le faire leurs prédécesseurs en 1988 lorsque le président Chadli Bendjedid, profitant du mécontentement populaire, n’a pas hésité à régler ses comptes avec certains hommes forts du sérail par population interposée ? Pour mémoire, cette explication entre clans et dont les principaux acteurs restent à ce jour impunis fera 500 morts et presque autant de blessés. Avec en prime, une généralisation de la pratique de la torture.

Les militaires reproduiront-ils aussi les mêmes erreurs que celles commises par les gendarmes en Kabylie en 2001 qui ont tué 126 jeunes manifestants, dont le seul tort a été d’avoir demandé que l’on rende justice à la famille de Guermah Massinissa, un brillant lycéen assassiné à bout portant dans une brigade de gendarmerie dans la wilaya de Tizi Ouzou et que Noureddine Yazid Zerhouni, alors ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, n’avait pas hésité à qualifier de voyou ? Avec du recul, aujourd’hui tout le monde admet que la gestion catastrophique de la crise de Kabylie par le pouvoir et ses relais a porté un coup sévère à la cohésion nationale.
Car en plus des morts, la répression systématique ordonnée par le pouvoir a eu pour effet de plonger toute la région dans une grave crise politico-sécuritaire dont l’issue paraît encore très incertaine. En dehors du chef d’état-major de l’ANP, du ministre délégué à la Défense et du patron du DRS qui continueront sans doute à constituer un bloc compact autour du chef de l’Etat, il est évident que l’éventualité de se voir retrouvé face à face avec la population mettra le gros des cadres de l’armée devant un choix cornélien.

Mais quoi qu’il en soit, leur position constituera, à ne pas en douter, un facteur déterminant pour la suite des événements. Mieux, elle sera probablement de nature à faire pencher la balance d’un côté comme de l’autre. Tout en sachant toutefois, ainsi que le montre l’exemple tunisien, que le changement est de toute façon inéluctable. Réduits au silence depuis la venue de Abdelaziz Bouteflika au pouvoir, les militaires ont donné l’impression, jusqu’à il y a un passé récent, de s’être contentés de suivre les événements en qualité de simples observateurs. Eu égard justement aux expériences passées (coup d’Etat du 19 juin 1965 et arrêt du processus électoral en janvier 1992), il y a lieu de s’attendre à ce que tous les jeunes officiers supérieurs formés dans les grandes écoles de guerre russes, françaises ou nord-américaines réfléchissent à deux fois avant de prendre le risque de faire intrusion à nouveau dans le champ politique.


Cela quand bien même pour donner un coup de pouce à la démocratie. Néanmoins, les enquêtes fouillées menées par les «services» sur les scandales de corruption, qui ont éclaboussé les hommes du Président et le gros de la nomenklatura, laissent penser que les «jeunes loups» de l’ANP ne paraissent pas du tout disposés à accepter de porter sur leur dos un régime autoritaire sclérosé et complètement discrédité… et encore moins de payer les pots cassés à sa place.


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